Autour d’Edvard Munch

Autour d’Edvard Munch
Edvard Munch, oil o canvas, 86 x 129 cm., 1893, Munch Museum, Oslo

Depuis que le Palais royal de Milan, depuis que les expositions sont gérées par des sociétés privées (en général des maisons d’édition), la qualité des événements est très variable. Je me souviens de très belles manifestations comme celle du Caravage ou d’Antonello da Messina ces derniers temps.

L’exposition de Milan, Edvard Munch

Mais je me souviens aussi d’expositions pitoyables, comme celles d’Egon Schiele ou d’Edward Hopper. Celle dédiée à Edvard Munch et organisée par la société Artemisia fait partie de celles qui sont plutôt médiocres. Il y a plus de textes sur les murs que d’œuvres !Et encore, ces œuvres sont essentiellement des gravures (surtout des lithographies). Il y a une dizaine de tableaux, dont quelques beaux autoportraits. Le célèbre Cri n’est présent que par l’intermédiaire d’une lithographie !

Pour qui ne connaît pas l’énorme production de ce peintre exceptionnel, cela peut représenter une initiation. Mais avec un prix d’entrée exorbitant et un catalogue lui aussi très coûteux. Je suis bien placé pour savoir qu’une exposition de ce calibre coûte fort cher en assurances et en transports.

Mais la culture est devenue un luxe. Quand j’ai visité ce long parcours textuel, je n’ai eu qu’une bonne surprise : la projection des petits films que Munch a tourné lors de ses voyages… Quand je l’ai visitée, je n’ai croisé que deux groupes scolaires et seulement deux personnes ! Bref c’est très décevant et très frustrant. Je me rappelle de l’exposition de cet artiste présentée en ce même lieu en 1985 avec un catalogue publié par Mazzotta. C’était une tout autre affaire ! Mais cet événement permet au moins une chose: rappeler qui fut Edvard Munch.

Edvard Munch, notes biographiques

Né en décembre 1863 à Löten (Norvège), il a passé son enfance à Christiania, la capitale (appelée Oslo depuis 1925). Le jeune Edvard fréquente le lycée technique à partir de 1879. Un an plus tard, il décide d’abandonner ces études avec l’ambition de devenir peintre. En 1881, il s’inscrit à l’Ecole royale de dessin. Il loue un an plus tard un atelier avec six camarades. Il participe en 1883 au Salon des arts décoratifs.

Grâce à une bourse d’étude, il peut se rendre à Paris en passant par Anvers où il demeure trois semaines. Il a l’occasion de visiter le musée du Louvre et le Salon. De retour dans son pays, il fréquente le petit groupe d’avant-garde Christiania Bohême. En 1886, il réalise la première version de La Petite fille malade. Il a sa première exposition personnelle à Christiania en 1889. Puis il se rend de nouveau à Paris. Il étudie dans l’atelier de Léon Bonnat. Sa bourse d’étude est renouvelée en 1890.

Malade à son arrivée au Havre, il demeure à Nice pour sa convalescence. Puis il se rend à Paris. Il rentre en Norvège en 1892 pour une grande exposition personnelle. Il expose ensuite à Berlin où ses ouvrages font scandale – l’exposition a été fermée après une semaine. Les membres de la Sécession l’ont défendu et l’exposition a pu être présentée à Düsseldorf, à Cologne et encore une fois à Berlin.

Puis elle est allée à Copenhague, à Dresde et à Munich. A partir de 1893, il réside surtout en Allemagne et voyage de temps à autre à Paris. Et il passe l’état en Norvège. Il travaille alors à la Frise de la vie. Il peint Le Cri et La Femme et la Mort. En 1894, il réalise se premières eaux-fortes à Berlin. L’année suivante, Thadée Natanson fait son éloge dans La Revue blanche. Il expose au Salon des Indépendants à Paris en 1897.

Il voyage en Italie en 1899 où il retourne un an plus tard. Il signe un contrat avec le marchand berlinois Bruno Cassirer en 1904. Dès lors, sa notoriété est établie. Il ne cesse de parcourir l’Europe avec de brefs séjours dans des sanatoriums. L’intérêt pour son œuvre ne s’est jamais démenti jusqu’à sa mort, survenue à Eleky le 23 janvier 1944.

Son “héritage”

Ce qui est le plus frappant dans l’histoire de cet artiste qui a laissé toutes ses créations à la ville d’Oslo (qui lui a construit un musée en 1963) est qu’il n’a jamais eu une relation étroite avec quelque mouvement artistique que ce soit.

Son lien avec l’expressionnisme est patent. Mais il a anticipé cette forme d’expression très tôt, comme le prouve, par exemple, Le Baiser de 1897. Nous pourrions le rapprocher d’un seul artiste, Walter Sickert, qui, comme lui, a souvent choisi des sujets sombres et même macabres, avec des scènes de crimes ou de l’existence exécrable des miséreux dans les bas-fonds de Londres, à tel point qu’on a pu affirmer qu’il était Jack l’éventreur ! Dès ses premiers tableaux, encore réalistes, comme A l’aube (1883) ou Nuit à Saint-Cloud (1893) où, malgré une évolution stylistique importante, demeure une dominante : la mélancolie.

Bien sûr, il a aussi peint des paysages heureux et ensoleillés comme Soleil à Nice (1891), mais il n’en reste pas moins vrai qu’il a eu une prédilection pour des thèmes tragiques telle La Mort dans la chambre de la malade (1893) Et il lui est arrivé de conjuguer le clair et l’obscur dans un seul et même tableau (je songe à Rouge et blanc, 1893). En sorte que son œuvre tout entière est marquée par des contrastes puissants entre des représentations heureuses et d’autres affichant les aspects obscurs de la vie.

Les contraires

En fin de compte, il n’a jamais cessé de produire des toiles où la beauté et la laideur, l’amour et la mort, où la splendeur d’une scène idyllique comme Plein été (1915) d’une part et Hiver à la mer (1914) de l’autre font valoir des sentiments et des pensées complexes et opposées. Des chefs-d’œuvre comme Madone (1895) ou Jeunes filles au bain (1896) déclinent une vision du monde toujours changeante et toujours plus profonde. Comme Vincent Van Gogh, il n’a cessé de poursuivre une quête solitaire qui a été le fruit d’une poétique qui a mille facettes et néanmoins une cohérence dans sa traduction picturale, qui n’a jamais cessé d’évoluer en conserver ses caractéristiques essentielles.

Edvard Munch, Frammenti sull’arte,Edv Munch, a cura di Marco Alessandriini, Abscondita, Milano, 2022